La mère, figure fondatrice et enjeu de guérison en psychanalyse
La mère occupe une place centrale dans la construction psychique de l’individu.
Dès les premiers instants de la vie, elle représente le premier autre, le premier lien affectif, la première médiation entre le monde intérieur de l’enfant et la réalité extérieure.
C’est par elle que s’instaure la sécurité de base, condition essentielle à l’émergence du Moi. Son regard, sa parole, sa présence — ou son absence — façonnent la manière dont l’enfant perçoit le monde, les autres et lui-même.
La mère, au sens psychanalytique, n’est pas seulement une personne réelle : elle est aussi une fonction symbolique. Winnicott parle de « mère suffisamment bonne », celle qui sait répondre de manière ajustée aux besoins de son enfant, tout en lui permettant progressivement de tolérer la frustration et de se différencier d’elle. Lorsque cette fonction est défaillante — par négligence, rejet, emprise, ou instabilité affective — l’enfant peut être confronté à des blessures profondes : angoisses primitives, défauts de symbolisation, troubles de l’attachement ou encore conflits d'identité.
La toxicité maternelle, souvent liée à des traumas non résolus chez la mère elle-même, peut laisser l’enfant prisonnier d’un lien ambivalent, mêlant amour, culpabilité, peur et dépendance. Ces relations aliénantes entravent l’autonomie psychique et empêchent la construction d’un sujet libre et différencié.
C’est ici que la psychanalyse trouve toute sa pertinence. En offrant un espace de parole neutre, bienveillant et non jugeant, elle permet au patient de revisiter ces premiers liens, d’en identifier les manques, les excès ou les confusions. À travers le transfert, le sujet rejoue inconsciemment ces anciennes relations, souvent dans le lien au psychanalyste, ce qui permet leur mise en lumière, leur élaboration, puis leur dépassement. La parole devient alors un outil de libération : en nommant la douleur, on commence à la transformer.
La guérison ne consiste pas à effacer le passé, mais à en reconfigurer le sens, à désenclaver l’individu de la toute-puissance maternelle internalisée, et à redonner au Moi ses pleins pouvoirs. Ainsi, même en présence d’une mère toxique ou absente, l’individu peut, par le biais du travail analytique, se réapproprier son histoire, reconstruire son identité et accéder à une subjectivité plus libre.