Grandir sans père : quand le père est absent

Comment combler l'absence ?

Il est difficile, pour un enfant, de ne pas grandir avec ses deux parents. Chacun a son rôle et lui apporte ce dont il a besoin pour se développer dans les meilleures conditions. Grandir avec un père absent peut parfois être lourd de conséquences : manque, méfiance, baisse de l’estime de soi…

Le rôle du père, aussi vital que celui de la mère

Comme la mère, le père a un rôle important pour l’équilibre d’un enfant. Ces deux figures parentales lui permettent de trouver un équilibre et d’avoir des visions différentes de la vie. « La présence du père pondère et relativise celle de la mère, confirme Nicole Prieur, thérapeute et auteure de L’hypnose pour simplifier les relations familiales (pocket éd.). Grandir avec ces deux adultes en face de soi permet de ne pas être sous l’emprise d’un parent et enrichit nos valeurs au monde ».

Le regard que le père pose sur ses enfants est primordial pour leur construction identitaire et leur estime d’eux-même. Pour une fille, c’est à travers des phrases telles que « tu es mignonne, tu es jolie » l’aideront à prendre confiance en elle et à construire son rapport aux
hommes. Ne pas grandir avec son père peut générer une méfiance envers les hommes. Quant aux garçons, ils prennent, généralement, modèle sur leur père et c’est de cette façon qu’ils évoluent vers l’âge adulte. Sans cette figure, ils peuvent développer une surprotection pour leur
mère, leur soeur, leur copine…

Remplacer le père absent par une autre figure masculine

Nous pouvons souvent entendre « qui s’absente trop finit par ne plus manquer » mais ce proverbe n’est pas vrai lorsqu’il est question du manque de père. « Il y aura toujours un manque chez l’enfant, confirme la thérapeute. Cependant, il est en partie possible de remplacer le père absent par une autre figure : grand-père, oncle, beau-père… ». Ces personnes permettent de donner un contre-poids à la figure maternelle et donne à l’enfant un repère masculin dont il a besoin pour grandir.

Malgré cette nouvelle figure de « père », Nicole Prieur met en garde de ne pas « dénigrer celui qui est absent en face de l'enfant car il pourrait le traduire par « je suis un fils/fille de ce père critiqué donc je suis moi aussi critiquable », ce qui ne l’aide pas à construire son narcissisme. À la place, l’entourage peut expliquer à l’enfant que son père ne pouvait pas faire autrement. Souvent ces pères sont eux-mêmes victimes de parents absents et sont dépendants de leurs
histoires familiales. Attaquer un parent, quel qu’il soit, devant l’enfant, c’est symboliquement attaquer une partie de l’enfant car il est le résultat de ces deux personnes ».

 Une peur de l’abandon, un manque d’estime, surjouer une identification…

En plus du manque ressenti, l’enfant subit d’autres conséquences lorsqu’il grandit sans son père. Cet abandon provoque une fragilité narcissique qui l’empêche d’avoir une bonne estime de lui-même. L’enfantse demande pourquoi son père ne s’intéresse pas à lui et pense « qu’il ne vaut pas grand chose et qu’il n’est pas intéressant car, autrement, il n’aurait pas été abandonné». Il grandit également avec une peur de l’abandon qui le poursuit dans tous types de relation. Cette angoisse s’avère être handicapante face à son entourage.

Avec les autres et une fois adulte, la personne abandonnée peut « leur en demander trop pour compenser et réparer cette absence qui n’est pas de leur faute, précise Nicole Prieur. Mais son entourage ne pourra jamais combler entièrement ce manque, ce qui la laisse dans une éternelle insatisfaction. Par exemple, en couple, l’adulte qui a grandi sans père risque d’attendre que son partenaire l’aime pour deux : pour lui et pour son père absent. Mais ce n’est pas possible ».

Une autre conséquence est « qu’inconsciemment, l’enfant va surjouer une identification à ce père absent, explique la thérapeute. Moins il est présent, plus il lui manque et plus l’enfant risque d’essayer de créer un lien qui n’existe pas ou s’inventer des caractéristiques communes».